🏃🏻 Luis Suarez

zenga · 7 septembre 2006

Timide voire effacé, Luis Suarez est le seul joueur né en Espagne à avoir obtenu le Ballon d’or, en 1960. Artificier de la seule victoire internationale de la sélection ibérique, 2 Coupes des Champions, 2 Coupes Intercontinentale et 3 Scudetti avec l'INTERNAZIONALE, Suarez est véritablement une légende, n’en déplaise à certains…

Entretien avec Luis Suarez

Quels sont vos premiers souvenirs liés au football ?

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Je me rappelle avec beaucoup de nostalgie le temps où je pratiquais le football dans la rue, lorsque je n'étais encore qu'un gamin. Nous n'avions rien, et avec des amis, nous avions l'habitude de jouer sur les terrains vagues qui jouxtaient la Tour d'Hercules (NDLR : le plus grand monument de La Corogne). Il n'y avait pas de terrains, pas de cages, mais pour nous c'était toujours une véritable fête de taper dans le ballon. Le football était alors encore un jeu innocent. Ensuite, j'ai intégré les catégories de jeunes du Deportivo La Corogne. Pour moi, ce fut un vrai changement : on avait des maillots, des crampons et des vraies cages. C'est dans cette équipe que tout a réellement commencé pour moi.

Comment avez-vous été contacté par le Barça ?

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J'étais tout jeune quand mon entraîneur m'a annoncé que j'allais jouer avec l'équipe professionnelle du Deportivo à l'occasion d'un match amical contre le Barça. J'étais vraiment impressionné, mais je me rappelle avoir très bien joué. Les supporters catalans ont même scandé mon nom dans les tribunes et après le match, tout le monde est venu me féliciter. Ce match s'est avéré très important pour la suite de ma carrière car c'est à partir de là que les dirigeants barcelonais ont décidé de prendre contact avec moi.

L'arrivée d'Helenio Herrera au poste d'entraîneur a constitué un tournant dans votre carrière...

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C'est vraiment avec lui que j'ai atteint mon meilleur niveau et que j'ai acquis l'ambition qui me faisait auparavant défaut pour progresser. Il m'a donné le goût de la victoire et la confiance, qualités que je n'avais pas vraiment exploitées avec ses prédécesseurs. J'ai du reste été immédiatement conquis par ses valeurs humaines et professionnelles, basées sur le sacrifice et le dévouement inconditionnel. Il existait une relation privilégiée entre nous deux, une relation que je pourrais seulement comparer à l'amour d'un père pour son fils. Je n'ai jamais douté de lui, ni lui de moi, c'est ce qui faisait notre force.

Quel était son dispositif tactique à Barcelone ?

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Herrera confiait beaucoup de responsabilités à ses joueurs mais en même temps leur laissait une certaine liberté dans le jeu. A l'époque, les schémas tactiques étaient moins rigoureux vous savez, c'est la beauté du jeu qui primait avant tout, il fallait juste marquer un but de plus que l'adversaire. Notre jeu était clairement porté vers l'attaque et devait se baser sur la vitesse du ballon et celle des joueurs. Il y avait deux milieux de terrain qui se partageaient les tâches, entre travail défensif et offensif. En attaque, les ailiers avaient pour consigne de déborder les défenses pour fournir en ballon les deux avants centres. Herrera a profité des qualités naturelles de ses joueurs en adoptant un système de jeu basé sur la rapidité et sur la technique. S'il n'avait pas possédé de joueurs aussi talentueux qu'Evaristo, Martinez, Kubala ou moi-même, l'équipe n'aurait pas marqué 100 buts en une saison, ni remporté de titres, et il aurait sans doute réfléchi à un autre moyen de gagner les matchs. Il avait la capacité de tirer le maximum de ses joueurs, c'était sans doute cela sa grande qualité.

Quels sont vos souvenirs des Clasicos contre le Real Madrid ?

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Vous savez, ce sont des matchs à très haute tension mais c'est surtout entre les supporters des deux camps que la rivalité existe. Nous, les joueurs, nous nous respections beaucoup, il n'y avait aucun problème entre nous, mais sur le terrain c'était autre chose...je ne pense pas qu'avant c'était pire qu'aujourd'hui au niveau de l'engagement. J'ai même l'impression qu'il y a de moins en moins de gentlemen dans ce milieu...

Vous gagnez le Ballon d'or en 1960 et l'année suivante vous rejoignez l'Inter Milan. Pour quoi ce choix ?

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J'avais besoin de nouveaux défis à relever. L'Inter est arrivé au bon moment. Le fait qu'Herrera soit allé les rejoindre a également été déterminant dans mon choix. Il avait demandé mon arrivée en affirmant aux dirigeants de l'Inter que j'étais le joueur qui lui manquait pour pouvoir rivaliser avec les grandes équipes. Le Barça ne voulait pas me lâcher mais le club lombard a fini par débourser une somme astronomique pour l'époque, alors quand j'ai finalement eu l'opportunité de partir je l'ai fait, presque sans réfléchir. En arrivant, j'avais une pression énorme mais le fait qu'Herrera soit à mes cotés m'a beaucoup rassuré. Je ne connaissais rien de l'Italie, je ne savais pas à quoi m'attendre, mais j'étais sûr de mon choix. J'avais une confiance énorme en mon entraîneur et cela m'a permis de m'imposer tout de suite.

La première année est pourtant difficile...

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Herrera s'est vite rendu compte des différences de jeu qui existaient entre l'Italie et l'Espagne. Au départ, il pensait pouvoir jouer avec le 4-2-4 du Barça mais au fur et à mesure il a adopté un système beaucoup plus défensif. Là encore, il a su s'adapter aux caractéristiques des joueurs qu'il avait à sa disposition. Vous savez, je vous parle d'un temps où l'Inter n'était pas encore une grande équipe, c'était plus difficile de jouer là-bas que de le faire au Barça par exemple, mais c'était ça qui m'intéressait. Ma plus grande fierté, c'est d'avoir remporté des trophées avec l'Inter. Cela n'a pas été facile, mais j'ai contribué à ce qu'il devienne un grand club.

Quel est votre meilleur souvenir dans cette équipe ?

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La finale de la coupe d'Europe remportée face au Real Madrid ; c'était une grande satisfaction de pouvoir gagner contre le rival historique du Barça. J'en garde de merveilleux souvenirs car c'est là que nous avons vraiment gagné le respect de nos adversaires. Une juste consécration après autant d'efforts consentis sur le terrain.

On parle toujours du Barça de Kubala mais on a tendance à vous oublier malgré votre Ballon d'or. A quoi cela est-il dû à votre avis ?

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Peut-être que je ne suis pas resté assez longtemps à Barcelone. Je ne sais pas en fait. Je n'ai pas d'explication. Je n'ai jamais su me vendre comme certains, et je dois avouer que je ne suis pas extrêmement doué en relations publiques. Il y a beaucoup de joueurs qui ont joui d'une plus grande reconnaissance que moi, alors qu'ils n'ont pas fait beaucoup plus que moi. C'est un peu ingrat mais c'est la vie, je ne vais pas pleurer pour cela. J'aurais aimé avoir plus de considération, plus de respect, mais c'est du passé, je ne suis pas amer. Vous savez ce qui me fait le plus plaisir ? Ce sont les soirées organisées par France Football. Tous les lauréats sont invités, et là je me dis qu'ils ne peuvent pas faire l'impasse sur le fait que moi aussi je l'ai gagné ce Ballon d'or. Les gens sont obligés de constater que moi aussi j'ai été un grand joueur, avec un palmarès important qui plus est. D'une certaine façon, je fais partie de l'histoire de ce jeu, et cela, personne ne peut l'occulter.

Quelles sont les raisons pour lesquelles vous n'êtes pas retourné vivre en Espagne ?

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En Italie, je suis plus populaire qu'en Espagne. Ici, les gens éprouvent du respect pour moi, ils savent ce que j'ai fait pour l'Inter et me remercient tous le jours pour cela. Ils sont reconnaissants envers l'homme que je suis, au delà du simple joueur. Je suis toujours accueilli chaleureusement en Italie et c'est ce que j'aime ; il y a beaucoup de respect de la part de tous les supporters italiens et pas seulement ceux de l'Inter, c'est ce qui me rend le plus fier car je sais que c'est sincère. En Espagne, c'est un peu moins le cas, les gens vous tutoient, ils vous disent que vous êtes fantastique mais une fois que vous avez le dos tourné, ils n'arrêtent pas de vous critiquer. Si j'avais eu la possibilité de jouer pour l'équipe nationale d'Italie et si on me l'avait proposé, j'aurais beaucoup réfléchi...Et je crois même que j'aurais fini par accepter.

Vous avez quand même permis à l'Espagne de remporter son seul titre international. N'avez-vous pas eu l'impression que Franco s'accaparait cette victoire pour promouvoir son régime ?

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Franco n'aimait pas le football, il n'est jamais venu nous voir, ni à l'entraînement ni pendant la finale contre la Russie. Je me rappelle d'ailleurs qu'il ne voulait pas qu'on joue contre cette dernière pour des raisons diplomatiques. On était en train de s'entraîner normalement quand une personne de la fédération est venue nous expliquer que le match n'aurait pas lieu. Quatre ans plus tard, le sort a voulu que nous jouions la finale contre les Russes, et heureusement, nous avons gagné. Mais à aucun moment Franco n'est venu nous parler, ni nous ordonner de gagner. En fait, pendant toute la compétition, nous avons été tranquilles. Personne ne nous dérangeait ou n'est venu nous voir. Après la victoire, Franco nous a invités à Madrid et nous a remis une médaille du mérite, mais là non plus, il n'a rien dit. En fait, je crois qu'il ne savait même pas comment on s'appelait.

Quel est votre opinion sur le football actuel ?

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Les joueurs de football sont devenus des produits marketing. Ils ont tendance à beaucoup exagérer et devraient comprendre que le football demande de l'énergie et beaucoup de travail. En répondant à toutes les sollicitations extra-footballistisques, ils gaspillent beaucoup de temps précieux ainsi que des forces, physiques et mentales, au détriment de la compétition. Etre footballeur, c'est une profession et certains l'ont sans doute oublié. A mon époque, cela n'aurait pas pu avoir lieu, je pense que nous étions plus sérieux, nous avions plus le sens des responsabilités. Le football est devenu un simple business, je le regrette parfois, ça me dérange un peu que l'amour du maillot soit bafoué pour des histoires d'argent par exemple...

Quel est votre rôle aujourd'hui à l'Inter Milan ?

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Je travaille à la cellule de recrutement. Je me déplace partout dans le monde pour trouver des talents susceptibles de rejoindre le club. C'est moi par exemple qui ait découvert Javier Zanetti et Roberto Carlos, c'est pas mal non ?

Qu'est ce qu'il vous reste encore à faire dans le milieu du football ?

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Rien. Mon seul regret, c'est de ne pas avoir gagné de coupe du monde avec l'Espagne. A part ça, je n'ai aucun remords. Je suis content de ce que j'ai fait et me garde bien d'envier les autres. La jalousie est une mauvaise chose, il faut être heureux dans la vie et le football m'a procuré énormément de bonheur, je lui dois tout.

👤 Fiche complète du joueur

Modifié 8 septembre 2006 par zenga

Olivier · 7 septembre 2006

Je connais ce monsieur de nom et de réputation bien sur mais sympa l'interview en tout cas

ambrogio · 7 septembre 2006

Merci beaucoup Zenga je m'empresse de lire cette Bio' des que tu l'auras finaliser ce joueur était d'une classe incroyable

Wannou · 9 septembre 2006

Un homme fantastique qui a aidé l'Inter a gagné ses titres de noblesse

Je ne savais pas qu'il s'occupait du recrutement (Capitano merci Luis )

magnolia-fan · 9 septembre 2006

L'Inter de Moratti jr a refilé du boulot comme observateur à pas mal d'anciens légendes (Angelillo, Bicicli, Corso, Jair et Suarez)

Il cite deux super joueurs comme étant ses découvretes, mais moi j'aimerais bien savoir quel est le scout qui est derrière les transferts de joueurs comme Rambert et Peralta...

zenga · 9 septembre 2006

Oui il a sans doute une petite "grande gueule" mais bon.. l'important

c'est ce qu'il a fait pour l'Inter sur le terrain.

Impe34 · 10 septembre 2006

Peralta...

Peralta c'est un deal avec l'ancien agent de Recoba.... Il a imposé Peralta à l' Inter... Je sais plus comment s'appelle cette agent uruguayen... Il est assez connu...

Bref Suarez est une de mes idoles... Et puis il a toujours garder le contact avec notre club...